Rencontre avec Astrid Veillon autour de la « liberté d’être »
AdminKarine2 Commentaires 0 Commentaire
Ces derniers mois et les récentes annonces marquent un contexte inédit et bouleversant pour l’Humain : la pandémie, des formes de discrimination, le racisme, la violence…L’opportunité de prendre conscience du sens profond de la liberté, de l’importance d’être les gardiennes et gardiens d’un droit fondamental. Il est certain que dans mon métier de coach, j’ai un engagement profond en matière de respect de l’Humain et une conscience morale en matière de liberté.
J’ai choisi d’aborder ce sujet au travers d’une interview inspirée par une femme inspirante : j’ai le plaisir de vous partager la vision d’Astrid Veillon sur la « liberté d’être ».
Astrid, auteure et comédienne (notamment l’héroïne de Tandem sur France 3), est avant tout une femme de cœur, libre, authentique. Elle incarne pleinement la force de la liberté dans sa vie personnelle comme dans ses rôles à l’écran. La vie vous amène des rencontres inspirantes et Astrid en fait partie. La rencontre de deux femmes, deux mondes qui se retrouvent autour de l’Humain.
"Libre d'être honnête envers les autres et envers moi-même..."
Astrid, que vous évoque la « liberté d’être » ?
Mon Dieu quelle question… Surtout par les temps qui courent. Voilà maintenant plus d’un an qu’on nous prive de cette liberté si chère à mon cœur au nom de notre sécurité, de notre santé. La liberté d’être… je pense qu’elle est indissociable des questions : Qui sommes-nous ? Qui suis-je ? Il est tellement difficile de se connaître pleinement, réellement… D’autant que la femme que je suis aujourd’hui n’est plus la jeune fille que j’ai été, même si je suis faite de mes expériences. Ce à quoi j’aspirais, ce à quoi je croyais a évolué, changé, muté et moi avec. Qui peut prétendre se connaître foncièrement ?
A l’aube de mes cinquante ans, je peux affirmer que je me suis libérée de la plupart de mes conditionnements, de l’inconscient collectif, de mon éducation, des liens toxiques qui pouvaient m’entraver. Je me suis toujours sentie profondément libre d’être honnête envers les autres et envers moi-même. Cette honnêteté a pu me porter préjudice car elle fut parfois maladroite, mal interprétée mais je n’ai jamais su faire semblant. J’ai mis de l’eau dans mon vin, je me suis rendue compte que toutes les vérités n’étaient pas bonne à dire, je déteste faire du mal. Bref, ma définition de « la liberté d’être », qui ne reste que la mienne, ressemblerait peut-être à ça :
« M’accepter comme je suis avec mes défauts et mes qualités. Ne plus avoir peur du jugement des autres. Ne plus avoir peur tout court (je n’y arrive pas encore !!!). Faire des choix en accord avec mes valeurs. Me positionner face à l’autre, ne pas être d’accord, savoir dire non et surtout écouter mon instinct. Ne pas redouter de prendre des décisions qui s’imposent même si elles demandent courage, détermination, même si elles bousculent le petit train-train du quotidien ».
"Gratitude envers la vie..."
Quelle est votre raison d’être en tant qu’actrice ? (Envies, combats, …)
Mon métier a été ma raison d’être pendant de longues années, comme j’aime à le dire mon rêve de devenir actrice m’a poussée au-delà de ma zone de confort, m’a aidée à surpasser mes peurs, m’a sauvée la vie. Aujourd’hui, j’ai une profonde gratitude envers la vie. Je vis de mon métier et mon métier est de jouer la comédie. Qui ne rêve pas de jouer comme un enfant toute son existence ? Je n’ai pas d’autre prétention que de faire ce que j’aime du mieux possible en respectant mon travail mais aussi les gens qui regardent mon travail. Je m’investis à fond dans tout ce que je fais. J’ai envie de réaliser, alors je réaliserai, un jour. J’ai eu envie d’écrire et j’ai écrit. Ma seule et unique pièce de théâtre « La salle de bain » a été un succès qui m’a encouragée à recommencer l’expérience de l’écriture avec mon premier roman et la vie m’a fait rencontrer un éditeur etc… J’essaye de ne pas me mettre de limites. Je n’ai pas peur de l’échec, on se relève toujours.
Je n’ai pas de combat particulier, la notion de « combat » est déjà trop agressive pour moi. J’ai des coups de gueule, des coups de sang, des coups de blues. J’aimerais un monde plus doux, plus joyeux, moins violent mais je ne fais pas de politique. J’écoute, je regarde, j’analyse. J’ai du mal avec la société d’aujourd’hui et je doute que cela s’arrange. Alors, je me dis que je contribue au bien-être de certains à travers mes rôles, mes livres. Égoïstement ça m’apaise. J’essaye de faire du bien autour de moi. Ma seule envie à ce jour est le bonheur des gens que j’aime. Je souhaite avancer, continuer d’apprendre, d’évoluer.
"La liberté est un état d'esprit...Ne pas juger les autres"
Pensez-vous que la « liberté d’être » soit une conviction, un choix ? Nous ne sommes pas tous égaux face à cette liberté ?
Oh, que non ! Il est plus facile pour quelqu’un comme moi qui vit ses rêves, ses passions, d’être libre « d’être », j’en ai conscience. Quoique… À une époque une chaîne m’a « blacklistée », comme on dit, parce que j’étais trop moi-même. Dans mon métier, je refuse la hiérarchisation, nous sommes tous dépendants les uns des autres. Des producteurs sans diffuseur ne produisent pas. Des diffuseurs sans film ne diffusent pas. Des acteurs sans auteur ne sont pas grand-chose. Des réalisateurs sans technicien ne réalisent rien… Cette façon d’envisager les êtres humains me permet d’exprimer mes idées, mes désaccords, mes points de vue en toute liberté parce que nous sommes tous égaux. Cependant, dire ce que l’on pense, ne pas être d’accord dans un monde de plus en plus aseptisé n’est pas aussi simple. Avec les réseaux sociaux, tout peut s’enflammer très vite. Une phrase sortie du contexte, un mot, une maladresse peut coûter une carrière.
"Où place-t-on la liberté ?..."
Alors personnellement, j’ai fait le choix de ne pas être sur les réseaux sociaux, une façon de garder encore et toujours ma liberté de penser, de vivre. J’ai une super jeune femme, Katie, pour ne pas la citer, qui s’occupe de ma page Facebook, je ne réponds jamais aux personnes qui me suivent (mais je lis tout !), je ne cherche ni à faire le buzz, ni à gagner une quelconque célébrité. Je ne lis pas mes articles, ni les critiques (elles m’ont tellement blessée à une époque) là aussi je fais le choix de ma liberté, une mauvaise critique peut influencer ma façon de jouer, mes choix. Seul le regard de mes proches a une importance, leur avis est souvent objectif et constructif.
En fait, plus je parle plus je pense que la vraie liberté est un état d’esprit. J’ai rencontré des personnes qui avaient « tout » pour être libres, une bonne situation, une bonne santé, une belle famille, pas de problème financier, une belle maison blabla… Et pourtant, elles étaient prisonnières… prisonnières de leur réussite, de leur carrière, de leur confort… alors où place-t-on la liberté ? Parce qu’elle est là, la vraie question et chacun aura sa propre réponse. J’ai fait des choix dans ma vie pas toujours judicieux, j’ai perdu des êtres chers, j’ai eu une enfance chaotique, comme tout le monde j’ai fait des erreurs, j’ai eu des hauts, des bas mais je ne regrette rien, si je devais recommencer je referais tout pareil. Je ne dois rien à personne. Je suis là où je voulais être. Je suis dans la vie, pleinement, je pleure, je ris, je danse, je chante. J’accepte ce que je suis et j’essaye de ne pas juger les autres. Je me sens de plus en plus libre.
" Etre fière de soi, se regarder dans un miroir sans rougir..."
Quelles sont vos ressources pour aller vous connecter à la force de la liberté ?
J’ai un rapport très fort avec la spiritualité. J’ai la foi. Je médite beaucoup, je me connecte à la nature. Je suis entourée de gens aimants, sains. J’aime et je suis aimée. L’amour n’est-il pas la plus belle des ressources ?
Comment selon vous assumer les revers de la liberté ? Parfois, la liberté a un prix à payer ?
Comme je l’ai dit je l’ai déjà payé cher… Qu’est ce qui est le plus important ? Être fier de soi, se regarder dans un miroir sans rougir, s’endormir serein ou faire semblant, jouer un rôle pour plaire aux uns et aux autres, faire des choix pour satisfaire son égo. On n’a le droit de ne pas être d’accord, de ne plus aimer, de vouloir changer de cap, de vie, d’arrêter une relation qui nous abîme, une série qui fonctionne mais qui ne vous satisfait plus. Par-dessus tout, nous avons le droit de nous tromper, de faire fausse route, de nous excuser si nous avons blessé; c’est aussi ça être libre, reconnaître ses erreurs. Mon intégrité ne souffre d’aucun compromis.
" Je suis tout simplement..."
Comment incarnez-vous la liberté d’être ? Dans votre rôle de femme, de maman ?
Encore une fois, je ne me pose pas de question, je « suis » tout simplement. Mon fils est l’être le plus précieux de ma vie mais il n’empêche que je lui dis toujours ce que je pense avec la plus grande sincérité. Lorsqu’il fait un beau dessin, ou réalise une belle action, je suis sa première « Fan », je l’encourage, le félicite. En revanche, si je trouve son dessin vilain je lui dis aussi. Je me suis parfois « loupée » avec lui sous le coup de la colère, le mot de trop. Alors je me suis excusée et lui ai permis par cette erreur de se tromper à son tour. Personne n’est parfait, ni lui, ni son père, ni moi… L’important est de faire de son mieux, de se respecter, et de respecter l’autre.
Je le pousse pas mal à l’école. Jules a de belles possibilités, et je lui explique que je souhaite qu’il devienne un homme libre. Je ne veux pas qu’on décide pour lui. Il fera ce qu’il voudra mais pas ce que les autres voudront et à mon sens ça passe par les études. Quand il me dit qu’il n’aime pas je lui demande d’argumenter. C’est important d’avoir le vocabulaire, les connaissances pour débattre. C’est aussi une forme de liberté. En tant que femme, je sais aujourd’hui ce que je ne veux plus et c’est déjà beaucoup…
" Avancer, évoluer, ne pas recommencer les mêmes schémas..."
Vos livres symbolisent « cette liberté , « Pourras-tu me pardonner ? » : pardonner pour se libérer soi-même avant tout, briser des chaînes…
Le sujet de mon premier roman est la quête d’identité. Et effectivement, comme je l’ai déjà dit je crois que pour être profondément libre, il faut d’abord savoir qui l’on est.
Pour ce qui est du pardon, évidemment que la liberté passe par le pardon. Sans pardon, l’aigreur s’installe et diffuse son poison, le pire des enfermements. Je ne parle pas du pardon judéo-chrétien mais le pardon du cœur (Ceci dit, il n’y a pas vraiment de différence !)
Briser les chaînes… C’est encore un autre débat, nous sommes tous marqués par l ‘héritage transgénérationnel. Le bon comme le mauvais… Et je sais de quoi je parle. Est-ce une fatalité ? Je ne le crois pas, c’est à chacun de nous de briser ses chaînes pour avancer, évoluer, ne pas recommencer les mêmes schémas… Pas toujours évident mais ça vaut le coup d’essayer.
« Neuf mois dans la vie d’une femme » : la liberté d’être femme, d’être mère…
Alors, je vais être totalement honnête, c’est ce que je revendique depuis le début de cette interview n’est-ce pas ? … Ce livre n’aurait pas du exister. Je ne le regrette pas mais je le trouve inutile. J’aurais du le garder pour moi, pour mon fils. Qu’est-ce qu’on s’en fout de la grossesse d’Astrid Veillon ??? Je me suis laissée embarquer. Je n’ai pas réfléchi… Il est là, tant mieux mais je n’ai rien à dire dessus…
"Pourquoi-nous ? est un hymne à la liberté..."
Pouvez-vous nous parler de votre prochain roman « Pourquoi nous ? » qui sort prochainement (sortie prévue le 03/06/2021) ? Un lien avec la liberté ?
Alors, là pour le coup c’est exactement le sujet… Et pour le prouver je ne peux m’empêcher de vous en lire un extrait :
« Depuis, l’adolescence, Lucy rejette tout ce qui peut entraver sa liberté. Aujourd’hui, elle se demande ce qu’est la vraie liberté. Une philosophie, une idéologie ou tout simplement un état d’esprit… Qui peut prétendre être libre ? Avancer seule pour ne dépendre de personne. Ne jamais s’engager pour ne pas être brisée. Ne rien construire pour éviter l’effondrement. Ne pas se projeter pour ne pas être déçue. Cette résistance ne reflète-elle pas, justement, un empêchement dans cette fameuse quête de liberté réduite aux dictats de ses phobies ? « Ma seule liberté est de rêver, alors je rêve de liberté » Benoit Granger. Seule la nature est véritablement libre … Est-il bon de dire tout ce que l’on pense au moment où on le pense ? Est-il envisageable de faire ce que bon nous semble au détriment des autres ? N’importe où ? N’importe quand ? … Notre mental n’est-il pas notre geôlier ? » …
Voilà, je ne pouvais pas trouver plus explicite… Mon troisième roman intitulé « Pourquoi nous ? » est un hymne à la liberté. L’héroïne est la femme que l’on rêve toutes d’être. Je ne pense pas me tromper, ni être présomptueuse lorsque je dis TOUTES. En tout cas, j’aurais tellement aimé lui ressembler… Ce roman est une magnifique histoire d’amour dans tous les sens du terme, l’amour maternel, l’amour charnel, l’amitié, l’amour familiale, filiale…
"Le coeur ...une forme de liberté ?..."
En conclusion, quel serait votre message « totem » à transmettre aux femmes et aux hommes pour toujours préserver « la liberté d’être » ?
Wahou… Lourde responsabilité que je ne prendrai pas… La vie m’a appris que seul le cœur prend les bonnes décisions. Quand c’est fini il le sait. Le bon choix il le chuchote. Les bonnes personnes, il les reconnaît. Alors, écouter son cœur ressemblerait-il à une forme de liberté ? Et je reste persuadée que ma liberté ne ressemble à aucune autre…
Une superbe conclusion, que rajouter de plus si ce n’est un grand merci Astrid Veillon pour ce partage et ce moment « vrai » ! Au plaisir d’une nouvelle rencontre sur le chemin de la vie.
La force d’être soi, briser les carcans des conditionnements, oser « être », ne pas craindre le jugement et surtout être fidèle à qui l’on est…choisir l’amour plutôt que la peur…le cheminement de toute une vie !